Interview de Claire de Saint Lager, fondatrice de ISHA Formation
• Grâce à tes ateliers sur le rapport au corps, aurais tu des exercices / des habitudes que tu pourrais partager avec nos lectrices pour les aider à vivre cette période compliquée ?
Nous allons sans doute reproposer le « cycle Yaphah » mais à distance avec Sophie pour les femmes qui le souhaiteraient. Plus d’infos à venir. Sinon, ce n’est pas facile de répondre à cette question, car je pense qu’il ne faut pas forcer les choses. Souvent on veut s’imposer quelque chose de drastique (sport, étirement…) mais alors on lâche vite l’affaire parce que ça ne nous apporte pas de joie ! A chacune de trouver ce qui lui fait du bien : danser, marcher, s’étirer, respirer. Cela passe aussi beaucoup par la présence aux choses je pense : goûter le contact de l’eau sur la peau sous la douche, prendre le temps de s’imprégner des arômes du café le matin, savourer chaque gorgée de vin et le sentir couler dans notre gorge, prendre vraiment le temps de ces câlins avec vos enfants si vous en avez… Le corps n’est pas une machine à entretenir, mais le lieu de notre relation au monde et à la vie !
• Quelle part de notre féminité peut nous aider à vivre ce confinement ?
L’intériorité, la dimension spirituelle, l’intuition, toutes ces dimensions sont fortement reliées au féminin. Je crois aussi que vivre le « manque » et il peut y avoir du manque pendant le confinement ouvre à la possibilité d’être comblé. Entrer dans ce manquer, accepter le vide, et voir que « dans ce vide il y a du plein » comme me disait une amie. Par ailleurs continuez de prendre soin de vous, de choisir vos tenues en fonction des jours, de vous faire belle, même si vous êtes seule ou en famille, pour les jours où vous voulez marquer le coup (anniversaire, fête, le jour de Pâques…). Il s’agit d’abord de vous offrir cette beauté à vous mêmes !
• Peux tu te présenter ?
Je m’appelle Claire de St Lager, j’ai 34 ans, je suis auteur, conférencière et formatrice. J’ai fondé en 2016 ISHA formation, où je propose des formations et un accompagnement pour les femmes jeunes et moins jeunes, afin de renouer avec le féminin, retrouver l’unité et rayonner !La formation phare d’Isha formation, ce sont les Sessions Isha, une « respiration » de 4 jours pour les femmes afin de se réconcilier avec elles-mêmes, de redécouvrir leurs trésors, d’écouter leurs désirs pour mieux habiter leur vie et rayonner. Et pour transmettre la joie d’être femme aux plus jeunes, les femmes peuvent se former à la pédagogie Graine de Femme, un parcours interactif pour les jeunes-filles (15-17 ans) afin d’oser être femme et d’oser être soi avec profondeur et légèreté. Je suis par ailleurs auteur de « La Voie de l’Amoureuse » (Edition Artège 2017), un essai sur la femme et le féminin ; et de « Comme des colonnes sculptées » (Editions Emmanuel 2020) sur l’attente et l’espérance dans le célibat : plus d’informations en cliquant ici.
J’ai aussi créé deux autres cycles de formation, approfondissant les thèmes de la Session Isha, le cycle Yaphah avec Sophie de Guerry (chanteuse lyrique) sur le corps féminin, et le cycle Leikha avec Laure Bourdin coach certifié sur la mission (vocation professionnelle et personnelle).
• Dans quels cadre/conditions vis tu ce confinement ?
J’ai sorti mon deuxième livre le 11 mars et devais ensuite partir en vacances me reposer, j’ai donc choisi d’être à la campagne. Je suis en Anjou dans une maison de famille, j’ai la chance de vivre ce confinement dans la beauté et l’explosion fleurie du printemps. C’est une grâce de voir la nature s’ouvrir et s’épanouir au fil des jours. Cela m’est rarement arrivé.
• Peux tu nous parler de tes ressources pour vivre ce confinement ?
Ayant un métier indépendant, avec une grande dimension créative, cela fait maintenant 4 ans que je gère mon temps de façon totalement autonome. Je ne suis pas totalement déroutée par le confinement, d’autant que pour écrire, il m’est nécessaire de me retirer, de me créer des espaces « sanctuarisés » pour créer. Mais d’habitude ces espaces sont toujours ponctués de rencontres et de présence au monde (par les formations que je donne, les rendez-vous, l’espace de coworking, les relations familiales, amicales et les sorties). J’avoue que lorsque le confinement a été annoncé, je pensais justement que le printemps serait un temps de renaissance relationnelle après avoir été un peu en retrait pour finir un livre pendant un an. Il m’a donc fallu accepter ce « confinement » non choisi… J’ai l’habitude d’avoir un rythme, des journées avec leurs rituels, j’ai besoin de temps pour nourrir ma vie intérieure et des fenêtres de beauté, afin de créer et travailler. Mais je n’aime pas être trop sclérosée dans des habitudes, alors je peux varier dès que j’en ressens le besoin.
Le plus difficile en confinement, c’est que loin du bruit du monde, affleure notre bruit intérieur, toute l’eau boueuse de nos doutes, de nos peurs et de nos contradictions. Il s’agit de vivre avec cela, sans se laisser engloutir. C’est comme un nettoyage de printemps mais intérieur. Seulement il peut y avoir des moments très inconfortables. L’habitude de vivre ces moments de retrait me permet d’y faire face. C’est sans doute différent lorsque l’on est confiné en famille, mais d’une certaine façon, c’est à travers la relation aux autres que ce bruit intérieur est exacerbé : il s’agit d’y être attentif, d’écouter ce que cela nous dit !
• Tes petits bonheurs en confinement ?
La beauté de la nature : entendre le chant des oiseaux, apercevoir des biches, des chevreuils, des poules faisanes aux abords du village parce que l’activité humaine s’est tue, ils ont retrouvé audace et liberté. Voir la nature s’épanouir, les tulipes et les jacinthes ont fané ces derniers jours pour laisser la place aux roses dont les boutons s’ouvrent, le muguet explose ses parfums et ses couleurs depuis deux jours. Les arbres sur lesquels s’ouvre la fenêtre de ma chambre s’étoffent chaque jour un peu plus, ils étaient sans feuille à mon arrivé, ils revivent chaque jour un peu plus. La beauté et la lumière ont toujours été une grande source de plénitude et de consolation… ces derniers jours j’en jouis de façon privilégiée.
• As tu des moments de craquage / folie dans la journée qui t’aident à tenir / te re-booster?
En ce moment pas trop. D’habitude je peux me mettre à danser sur une musique pour évacuer de l’énergie, j’ai énormément besoin de rire aussi (vivent les amis !), mais ces derniers temps c’est un besoin de douceur qui a pris le pas. Cela passe par cuisiner (ce que je fais moins à Paris vu la taille de ma cuisine), contempler, me remplir de beauté, lire, cueillir des fleurs pour faire des bouquets … et écouter des émissions d’Histoire (Stéphane Bern est devenu mon meilleur ami). Dans les moments plus difficiles, un coup de fil avec des proches en qui j’ai confiance me ressource beaucoup.
• Une habitude de confinée que tu aimerais garder pour après ?
Moins répondre aux sollicitations… Au début du confinement, il y avait une explosion des sollicitations WhatsApp, téléphone, skype et autres, un flux d’informations qui m’a fatiguée. Je me sentais envahie, comme si on me dérobait un temps à distance. J’essaie d’apprendre à trier, dire non, prendre du recul quand certaines relations peuvent être difficile pour mieux renouer. La coupure du confinement nous impose des limites, j’apprends à mettre des limites intérieures aussi. Un long chemin !
• La question que tu te poses en ce moment ?
Comment continuer de se laisser faire ? Le confinement m’oblige à changer mes activités professionnelles, mes propositions. Cela fait 4ans qu’étant à mon compte l’équilibre est toujours à redéfinir, les aléas, les changements de cap sont habituels pour moi. Mais il m’arrive de me décourager, de trouver que je sème et donne beaucoup, d’avoir soif d’un tout petit peu plus d’équilibre et de sécurité. De l’autre côté, je sens bien que cet équilibre s’enracine bien plus en profondeur, car il n’est pas matériel… Mais j’aimerais continuer à mûrir en cessant de résister aux évènements pour les accueillir, et accueillir les fruits qui peuvent en découler. Encore tout un chemin…